Hello Emmanuelle (partie 08)

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IMG_3177LUCAS

LA VÉRITÉ, CELLE DE L’APPARENCE

Avec Lucas, c’était mortel. Je ne voulais pas d’émotions, de disputes, de jalousie, ni me sentir délaissée ni abandonnée. Pour cela, il fallait ne pas aimer. L’amour adulte m’avait déplu à cause de mes parents qui se disputaient sans arrêt. Je ne savais pas pourquoi et c’était insupportable. J’étais impuissante à les arrêter. Ils méritaient d’être culpabilisés. Les parents devraient montrer le bon exemple.

J’étais rentrée chez moi à contre cœur. Je réalisais que j’avais envie d’émotions, de sexe, de sentiments quels qu’ils soient. Tout au fond de moi, je hurlais mon désespoir. Je devais poursuivre mes expériences même si je devais en souffrir. Pour moi, expérimenter l’état amoureux, c’était se risquer à éprouver de la peine, mais aussi, pourquoi pas, des joies. J’avais pris ma douche. Lucas venait d’entrer. Je n’avais pas pensé à vérifier si Alexia avait préparé quelque chose pour le dîner. J’ouvrais le frigo et découvris du carpaccio, de la vinaigrette pour la salade et une magnifique laitue prête à être dégustée. Comme j’étais reconnaissante à Alexia d’avoir prévu ce repas. J’étais affamée. Lucas avait comme d’habitude, la mine renfrognée comme s’il venait de perdre un être cher. C’était réellement mortel d’être mariée avec lui. Mais devenir amoureuse pouvait se révéler mortel aussi. Comme Hamlet, je me posais la question d’« être ou ne pas être, vivre ou ne pas vivre ? » Je m’asseyais à table en face de mon mari. Je me goinfrais, Lucas me jetait des coups d’œil désapprobateurs. Je crois que je le provoquais. Il était guindé, obséquieux principalement avec les personnes fortunées et haut placées. Cela m’avait toujours exaspérée. Il ignorait que j’avais décidé de prendre le risque d’être vivante. Je lui fis un sourire gras avec le carpaccio, l’huile d’olive et la salade verte plein la bouche et les dents. De toute évidence, quoi que je fasse, je n’avais aucun pouvoir de séduction sur lui et pire, j’agissais comme une sale gosse. Je crois qu’il me voyait ainsi et non comme une femme. Je le regardais le nez dans son assiette, l’esprit ailleurs, c’était désespérant de vivre ainsi. Il me servit du rosé. Je commençais à me sentir mieux. Il était de plus en plus pincé. Sa bouche mince ressemblait à une fente. Son obsession de la discipline et des bonnes manières me semblait incompatible avec celle que j’étais.  Comment j’allais faire à Genève si je devais obéir au deuxième inconnu ? Voilà que, dans mon imaginaire, j’étais déjà dans le train pour Genève. Si Lucas savait. C’était jouissif de réaliser que j’étais aussi libre que lui. Il pouvait coucher avec des inconnues mais ce n’était pas envisageable pour sa femme. Je n’étais en réalité qu’une projection de la femme qu’il souhaitait, sans appétit sexuel mais avec un insatiable appétit à table. Je pense qu’il me voyait comme une femme-enfant mais dans le sens péjoratif. En aucun cas, une Lolita. Je m’interrogeais si lui aussi avait un double ? Peut-être que je pourrais l’aimer ? Nous vivions chacun avec nos doubles, celui de l’apparence. C’était un drôle de mariage, sans doute que je n’étais pas la seule femme qui vivait une double vie au sein de son foyer. C’était un sujet qu’on pouvait difficilement aborder. Je ne pouvais pas demander aux femmes des amis de mon mari si elles avaient une double vie. Certaines d’entre elles, fières de leur audace, me racontaient leurs frasques. Elles étaient passées à l’acte parce qu’elles en avaient par-dessus la tête d’être trompées. Elles en avaient tellement assez que les plus prudes d’entre elles s’étaient mises à enfin assumer d’avoir des relations extra-conjugales. Elles semblaient ravies et c’était une manière de se venger des trahisons de leurs époux. Elles appliquaient la formule « œil pour œil, et dent pour dent » en toute discrétion. Elles m’amusaient car je n’aurais jamais pensé qu’elles puissent franchir le pas de l’adultère. Une fois que c’était fait, plus rien ne les arrêtait. La culpabilité des premiers temps avait disparu.  Leurs rendez-vous étaient programmés suivant les matchs de foot, les heures de travail supplémentaires ou les parties de cartes. On savait que nos maris se couvraient les uns les autres. Ils avaient l’air si innocent, et pas particulièrement obsédés par le sexe. J’avais souhaité me vanter de l’expérience du Sofitel à mes copines. Noémie me l’avait déconseillé.

─ « Pourquoi ? Lui ai-je demandé.

─ Parce que, me répondit Noémie, on ne peut pas présager de l’avenir. Ce sont tes amies aujourd’hui mais demain elles peuvent passer dans le camp adverse. C’est dangereux de confier son jardin secret.

─ Mais toi, tu es au courant, lui répondis-je.

─ Il y a une différence entre tes amies et moi, me répliqua Noémie. Je ne connais pas ton mari et nous ne côtoyons pas des connaissances communes. C’est toute la différence. Demain tu peux tomber raide dingue d’un mec. Tu veux divorcer. On n’est jamais assez prudent. Tu fais comme tu veux, mais c’est bien que tu sois avisée. De plus les actes que tu fais sont plus risqués que des petites tromperies à la sauvette. Tu prends des risques de découvrir certaines choses de toi que tu ignores. La sexualité est une façon géniale d’apprendre à se connaître mais c’est aussi jouer avec le feu et tu n’es qu’au début de tes aventures. Si tu aimes cette route faite de sensations et d’imprévus, bienvenue à bord. »

Toutes les discussions que j’avais avec Noémie resurgissaient. Elle avait raison, il était préférable que je reste discrète. Elle avait également ajouté avec raison qu’elle serait dans de sales draps, elle aussi,  si mes actes étaient dénoncés. Les hommes que je rencontrais avaient été ses amants. Elle était mariée et agissait d’une manière réfléchie et non par vengeance comme mes amies. Elle aimait à la folie la séduction et le sexe mais souhaitait rester avec son conjoint. Il devait ignorer sa vie sexuelle annexe. Je jetais un œil en coin à Lucas tandis que je desservais la table et mettais la machine à laver la vaisselle en route. Il m’avait aidée à mettre les couverts et à apporter les plats, il estimait que sa tâche ménagère était accomplie. Il s’était lové dans le canapé du salon face à la TV. Il cherchait un programme à regarder. Il avait défait la boucle de la ceinture de son pantalon et retiré sa cravate. Il ne me regardait pas. Je ne le trouvais pas sexy, cela semblait réciproque. A l’extérieur, il agissait autrement, surtout avec les femmes. Ça m’agaçait, tant il se complaisait à tenter de les séduire. Il n’était pas discret. C’était vexant pour moi.  Avant le Sofitel, je ne me posais pas autant de questions. Je subissais mon mariage et l’attitude indifférente de mon mari comme si c’était normal. Je me demandais si je pourrais supporter de vivre ainsi encore longtemps. J’avais une TV devant mon lit. Mon mari me l’avait achetée pour pouvoir regarder ses émissions en paix. J’aurais aimé aussi avoir deux lits jumeaux. Je ne pouvais pas en parler à Lucas sans prendre le risque d’éveiller ses soupçons. Je m’endormis devant la TV.

 

Hello Emmanuelle (partie 07)

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IMG_3243Noémie éclata de rire en disant : « Vivement que ça se passe, ça ne te fera pas de mal ».

Nous avons ri à l’unisson en trinquant. Puis, Noémie me parla de son futur plan sexuel pour moi. Le champagne me montait agréablement à la tête, j’étais prête à entendre quel serait mon second acte à accomplir.

Je n’en croyais pas mes oreilles. J’allais prendre un train pour Genève et rejoindre un autre inconnu. Le voyage sera offert, le taxi aussi pour aller à la gare et pour le retour. Noémie me donnait la consigne de ne pas prendre trop de tenues vestimentaires car je n’en aurais pas besoin. Je voulais plus de détails. Il s’agissait d’une épreuve à passer pour surmonter le peu de sympathie que j’avais pour mon enveloppe charnelle, me précisa-t-elle. J’étais curieuse. Je souhaitais en savoir davantage mais Noémie me fit comprendre que ce serait une surprise. Il valait mieux que je ne sois pas préparée d’avance pour ce nouvel acte. Je la suppliai en vain d’être plus explicite. Rien n’y fit, elle ne céda pas. J’avais le choix de ne pas me rendre à Genève ou bien de m’y rendre mais en acceptant ses conditions. Elle me rassura en disant que je pourrais l’appeler à tout moment et aussi revenir à Paris plus vite que prévu. En clair, je n’étais ni piégée ni cloîtrée. Mais si j’accomplissais cet acte, il faudrait que je fasse ce que l’inconnu me demande. Je la regardais effarée. Noémie me dit :

« Ma biche, ne te fais pas de soucis, je connais l’homme que tu vas rencontrer si tu vas à Genève. Il ne t’a pas mangé, celui du Sofitel. Il t’a même fait du bien, tu me l’as avoué ».

J’étais franchement surprise et inquiète. Qu’est-ce que j’allais dire à Lucas ? Inconsciemment, il devenait ma planche de salut pour reculer sur ce coup-ci. Noémie répliqua :

─ « Débrouille-toi, ton mari sait s’arranger pour te mentir quand il te laisse. Fais comme lui. Sois cool ma biche, tu es une grande fille maintenant et Lucas n’est pas ton papa. »

Je ne pus m’empêcher de sourire à cette phrase. Mon mari mentait effrontément, me trompait et moi, j’étais en train de penser que j’allais le trahir. Noémie avait tapé dans le mille en parlant de Lucas. C’était réglé, j’allais partir pour Genève tous frais payés. Le côté « pute » me plaisait et cela me ravissait de sortir du rôle de l’épouse bobonne. Si Lucas savait qui j’étais, il ne pourrait pas y croire. Il me voyait toujours la même, une femme fidèle, tranquille mais pas assez obéissante à son goût. J’avais un coté révolté, insoumis qui surgissait de temps à autre. Lucas interprétait cela comme des caprices. Comme mes parents, il avait tenté de parfaire mon éducation sans succès. Il avait fini par abandonner. Il ne se méfiait pas de moi et pourtant il faut se méfier des apparences et de l’eau qui dort. Même moi, je m’étonnais et je n’en étais qu’à mes débuts. Nous nous sommes quittées, je me sentais bien. Noémie paraissait contente de l’évolution de mes aventures de libération.