Article de Unwalkers au sujet du livre Innocence Coupable de Matti King

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Article paru sur le site www.unwalkers.com au sujet du livre de Matti King : Innocence Coupable.

Qu’y a-t-il de plus horrible que de se faire souiller, v(i)oler son intimité ? Et d’autant plus lorsque le coupable s’avère être une connaissance, quelqu’un que l’on côtoie fréquemment.
Carla a six ans. C’est une enfant comme les autres, avec des rêves de petite fille, des jeux, des peurs, et de l’amour à revendre. Tanine a 43 ans, et souffre d’amnésie. Son enfance est partiellement effacée, et elle mène une vie de femme recluse, s’interdisant tout contact avec l’extérieur, en particulier les hommes. Carla et Tanine sont une seule et même personne.
Violée par son beau-père dans un souterrain, Carla s’est construite une carapace au fur et à mesure qu’elle a grandi, créant un dédoublement de la personnalité nécessaire pour survivre à ce traumatisme. Un beau-père insensible et pervers, une mère fermant les yeux sur la vérité, Carla grandit en ayant des préjugés et des idées fausses sur le sexe et la vie.
« Le passé tu y fais attention comme si c’était une porcelaine et la vie, tu la laisses filer. Dommage. »
Puis vient l’élément déclencheur ; l’enterrement de son beau-père. Carla reprend le pas sur les pensées de Tanine, qui avait refoulé toute son enfance. Les souvenirs remontent, l’angoisse aussi. Plus de 30 ans après le drame, elle entreprend une thérapie pour faire remonter les souvenirs de Carla, et se libérer de Tanine, pour pouvoir revivre et se libérer du poids de son passé qui la contraint à s’enfermer.
Peu à peu, grâce à son psy, elle reprend le contrôle de sa vie. Avec Selena, sa collègue et amie, elle va refaire son éducation sexuelle et découvrir le monde du sadomasochisme, lui permettant ainsi de s’épanouir dans son nouveau travail, mais également avec les hommes, qu’elle va recommencer peu à peu à fréquenter.
L’auteur alterne des passages de l’enfance et de vie d’adulte. Carla et Tanine se renvoient la balle, se parlent, l’une essayant de repousser l’autre, et l’autre lui rappelant ses souvenirs enfouis en se faisant de plus en plus présente, afin de lui ouvrir les yeux sur la vérité. Carla évoque sa culpabilité, et sa honte d’avoir pris du plaisir malgré l’inconvenance de la situation. Ces paroles sont bouleversantes de sincérité, et vont prendre le lecteur aux tripes. Tanine s’enferme dans une paranoïa incontrôlable, refuse la réalité et rejette les voix de Carla dans sa tête avant de s’obliger à sortir de cet état de déni.
Innocence coupable, c’est l’histoire d’une incroyable métamorphose. Celle d’une jeune femme qui va laisser à la fois l’enfant qu’elle a été, et l’adulte qu’elle était au profit d’une nouvelle identité ; une femme libre et libérée de son passé, devenue maitre d’elle-même et qui désormais croque la vie à pleine dent.
« Violer c’est déraciner une fleur, et le jeter n’importe où. Cette petite pousse brisée par la main assassine, pourra-t-elle jamais grandir, ou est-elle condamnée à mourir de chagrin ? J’ai pratiqué une greffe sur moi-même, et de cette bouture inespérée est née une deuxième vie. »
Des phrases parlantes et touchantes, qui au-delà de l’aspect touchant qui envahit le lecteur, redonnent confiance en l’avenir. C’est un récit poignant s’apparentant à un témoignage, qui insuffle de l’espoir pour les victimes ayant subi un viol ou autre coup dur.
L’histoire d’une renaissance qui semblait impossible.

Hello Emmanuelle (partie 11)

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IMG_1953Je réalisais que je n’avais pas poinçonné mon billet en entendant l’annonce prévenant que le contrôleur du train allait passer. D’un bond, je me levais de mon siège, affolée et toute cramoisie d’émotion. S’il fallait que je paie mon billet pour fraude, j’étais mal. Mon mari apprendrait que j’étais partie à Genève. J’imaginais le pire des scénarios et un voyage gâché par mon manque d’attention. A ma décharge, j’avais peu l’habitude de prendre le train. Je courais dans les couloirs en zigzagant à cause du roulis du train, mon sac sur l’épaule et au bord de la crise de nerfs. Au loin, j’aperçus un uniforme et un képi. Je fonçais dans cette direction en me cognant aux gens que je croisais. Marcher normalement dans un train était impossible. J’arrivais presque en larmes près du contrôleur. J’entendis Kelly me murmurer « laisse-moi faire, t’alarmes pas bobonne, on a autre chose à faire que de saboter ce voyage. » Arrivée devant le contrôleur, j’étais à la fois Robin et Kelly. L’homme n’était pas grand ni spécialement beau mais il avait un satané regard. J’étais à moitié en pleurs, encore rouge de confusion et je transpirais d’anxiété. Je captais une lueur sexuelle chez lui. Ses yeux me pénétraient, il me détaillait des pieds à la tête. Kelly persévérait à me parler « Détend toi,  relaxe toi, souris et continue de te laisser transpercer par son regard. Sinon dégage et laisse-moi agir. Tu vas tout saborder si tu fais ta nunuche. Ce n’est pas si grave. Bon t’as commis involontairement une infraction, on va faire notre Mea Culpa. Allez Robin, du nerf. » Le contrôleur me dit :

─ « Que puis-je faire pour vous, Madame ? tandis qu’il lorgnait discrètement mon décolleté.

Il avait une voix agréable. Je lui tendis mon billet, l’objet du délit. Ma main tremblait, peut-être était-ce à cause du train qui bougeait ?

─ « J’ai oublié de poinçonner mon billet, », avouais-je avec une voix de petite fille qui a fait une grosse bêtise. Il sourit devant ma confusion. Il semblait même apprécier cette situation. Kelly s’en mêla, « il a l’air d’aimer les paumées. Continue, t’es sur la bonne voie. Je crois que le billet va servir pour autre chose. Tu lui plais. Allons dans cette direction. Il n’est pas mal du tout ce Monsieur. Il a quelque chose de sexy, de très séduisant. C’est un gros macho, il va te plaire Robin. Tu vas baiser dans le train comme Emmanuelle dans l’avion. Allez poupée, c’est chaud tout ça. » Je me mis à rire nerveusement à cause des propos de Kelly. Ma tension baissa ainsi que mon niveau de stress. Le contrôleur me prit le billet des mains en me disant d’une voix polie et avec un regard brûlant :

─ « Vous permettez ?»

Il donna un coup de poinçon au billet et me demanda si je voulais boire quelque chose pour me remettre. On était à côté du wagon restaurant. Il me proposa de l’attendre dans son local qui d’ordinaire était fermé au public. Il revint avec une mini flasque de cognac, me la tendit et je bus au goulot. Il m’observait amusé. Le breuvage était fort, je toussais, jusqu’aux larmes.

« Ça va mieux ? » S’enquit-il. Je hochais la tête en guise de réponse. Il continua :

─ « Vous restez longtemps à Genève ? » Sa question me surprit tant que ma toux cessa. Je m’éclaircis la voix et lui répondis que je rentrais dimanche. Il regarda l’heure de mon billet de retour puis ravi, il m’annonça que nous serions dans le même train. Il me demanda si on pouvait prendre un verre à Genève. Je bredouillais que c’était impossible. Il semblait très intéressé par ma personne. Il proposa de se voir à Paris. « Eh, la cruche, tu vas pas passer ton temps à jouer les pucelles. Le temps file et moi je n’aurais pas eu mon compte de sexe ». Kelly s’énervait, ça devenait drôle ce conflit où j’avais du mal à vivre mon côté « pute ». J’avais de plus en plus chaud, j’étais excitée par le regard du contrôleur. Il me déshabillait des yeux. J’avoue que j’adorais ça. Lui m’appréciait au moins, il n’était pas comme mon mari. Je ne pouvais pas lui dire que j’étais nulle au pieu et que je serais sans doute meilleure à mon retour de Genève. Je souriais en pensant à cela et lui répondit détendue :

─ « C’est d’accord pour prendre un verre sur Paris. »